Publié le 26 sept. 2021 à 16 :00La mode parle de style masculin-féminin à partir de la fin des années 1960 ayant vu apparaître les premiers habits unisexes, mais les pillages dans le dressing des hommes avaient débuté bien avant. En 1913, Gabrielle Chanel ouvre une première boutique à Deauville et présente une ligne de vêtements décontractés en jersey souple qui était jusqu’alors réservé à la confection de sous-vêtements pour Messieurs.
Des décennies plus tard, en 1956, elle édite son premier tailleur en tweed chiné dont on raconte qu’elle aurait pioché l’idée dans les placards du Duc de Westminster ayant partagé quelques années de sa vie. Entre-temps, au cours des années folles, il y aussi les garçonnes qui commencent à s’approprier la chemise blanche. Puis, le développement de la société des loisirs à l’issue de la seconde guerre mondiale, ainsi que les modes sportswear venues des Etats-Unis et quelques nouveaux talents parisiens comme Cardin et Courrèges rêvant d’habiller la jeunesse et le futur à l’aube des sixties, conduisent à l’apparition d’un prêt-à-porter sans froufrous, avec des coupes nettes lorgnant plutôt du côté des tailleurs de costume trois-pièces que des couturières avec fleurs et dentelles.
Haut en laine angora, Valentino. Débardeur noir ajouré en coton avec franges, Givenchy. Veste en laine, Emporio Armani.
Pantalon Margaret en flanelle, Celine par Hedi Slimane. Mocassin 180 en cuir veau box noir, JM Weston. Nadine Ottawa pour les Echos WeeK-End.
Au fil des années 1960, n’oublions pas Yves Saint Laurent et ses détournements de grands classiques masculins – le smoking, la saharienne…-, avec force glamour. Ni les premiers designers milanais – Nino Cerruti, puis Giorgio Armani… -, qui habillent les hommes de nouveaux complets à l’allure ultra moderne, à une époque où ceux-ci délèguent encore les questions vestimentaires à leur épouse. Ces maisons italiennes se retrouvent ainsi aux premières loges pour saisir un intérêt des femmes pour le masculin-féminin.
Et très vite, elles leur apportent la preuve que s’habiller à la manière d’un homme peut être d’un chic certain.
Le pantalon à l’égal des hommes
A gauche, tailleur-pantalon Yves Saint Laurent Rive gauche, 1978. A droite, Jane Birkin et Serge Gainsbourg à Paris en 1969.
Les Arts Décoratifs, Paris/Jean Tholance/akg-images / Nicolas Tikhomiroff /, montent à cheval ou dévalent des pistes enneigées, le pantalon fait seulement sa véritable entrée dans la garde-robe féminine à la fin des années 1950. Le courant sportswear qui commence alors à débarquer d’outre Atlantique démocratise son port. Egalement, la mode des blue-jeans comme la jeunesse en Amérique.
« A partir de 1965, il se fabriquera en France, chaque année, plus de pantalons que de jupes », rapporte Laurence Benaïm, dans l’ouvrage « Le pantalon, une histoire en marche » aux éditions de l’Amateur. A l’époque, le style unisexe dont il deviendra rapidement l’archétype fait grincer quelques dents. Il en va de l’égalité des sexes et de la libération de la femme avec ce vêtement qui permet de tracer à grandes enjambées.
Le tailleur revu et corrigé
Collection Automne hiver 2021, Ann Demeulemeester. Willy VanderperreLa permanence du style masculin/féminin sur les podiums est également liée à la grande fascination des stylistes pour le tailleur structuré, construit avec des couches et des entoilages intérieurs comme autant de secrets. Les créateurs japonais en premier, Rei Kawakubo et Yohji Yamamoto en tête, ont beaucoup travaillé sur la construction/déconstruction du costume occidental lorsqu’ils ont commencé, au début des années 1980, à venir présenter leurs collections.
Veste à double boutonnage en laine vierge et cachemire, Berluti. Jupe en laine et coton, Balmain. Ceinture en peu de veau, Celine par Hedi Slimane.
Nadine Ottawa pour les Echos Week-End.Puis, les premiers créateurs belges qui avaient pléthore d’affinités électives avec les designers nippons, ont beaucoup joué avec ces mêmes codes masculins-féminins. Et en particulier l’Anversoise Ann Demeulemeester qui avait tiré sa révérence en 2013, suite au rachat récent de sa griffe par l’italien Claudio Antinioli, et qui pose de nouveau un regard sur les projets spéciaux de la maison qui porte son nom.
Un grand classique : la chemise blanche
Derbys, richelieu, mocassins
Coiffeur : Olivier le Brun Production : Hortense Bernardin Nadine Ottawa pour les Echos Week-End/h3> dont Giorgio Armani qui lui rend hommage à chacun de ses accrochages au Silos Armani à Milan, dont l’actuelle exposition « The way we are » qui célèbre les 40 ans de la ligne Emporio.